Mali, ô Mali

ORSENNA Erik

Quand une délégation de fières représentantes de la diaspora malienne à Villiers-le-Bel vient la trouver, la généreuse Madame Bâ n’hésite pas longtemps à répondre à l’appel : un destin historique, ça ne se refuse pas. Aux mains des djihadistes, son pays déchiré la réclame. Elle embarque son petit-fils dans l’aventure, pour lui servir de secrétaire-griot particulier et tenir la chronique de leur voyage. Dix ans après, Erik Orsenna reprend le personnage romanesque de la formidable « Grande Royale » de Bamako exilée en France. Cette fois, l’écrivain (Madame Bâ, NB juin 2003) la renvoie avec les honneurs dans son pays pour être le témoin éclairé, presque officiel, des événements tragiques qui s’y déroulent. Le ton gentiment farce, l’ironie légère et l’insolence roborative de ce roman picaresque ne font jamais oublier la gravité du sujet et de ses nombreuses incidences : malheur et grandeur de la femme africaine, tsunami démographique, montée des fanatismes, victoire de l’ignorance sur la sagesse et la culture. L’auteur s’amuse et amuse. En pédagogue rusé, il transmet sa passion et sa grande connaissance de la géopolitique africaine. On lui pardonne quelques infimes coquetteries, rodomontades et digressions car ce sont celles de sa superbe héroïne donquichottesque.