Ligne 135

Elle va seule chez sa grand-mère, très loin, à l’autre bout du voyage, à l’autre bout de l’album, format à l’italienne. De quoi imaginer une histoire connue. Mais non : sa mère l’accompagne à la gare ; sa grand-mère l’attend à l’arrivée ! Aucun loup ne vient perturber le long trajet en monorail qui mène la fillette de mégalopole en village à travers banlieues, forêts ou campagne et  paysages imaginés.

Le train file à l’horizontale de la page ; tantôt haut, tantôt bas, seule touche de couleur, vert anis et orange dans un décor dessiné au rotring, en noir et blanc, qui laisse une grande place au rêve. Voyage à contretemps, du monde d’aujourd’hui avec ses enseignes agressives à celui d’hier où sont signalés  « l’école » ou le « laitier » et où, paradoxe, le train croise plus de vie. Pas de nostalgie pourtant mais une méditation d’enfant, au rythme du rail : ses espoirs, ses projets et, les voyages formant la jeunesse, une manière de se détacher, en douceur et avec tendresse de ce que « disent… mère et… grand-mère ». Un album sensible et élégant dans son graphisme minimaliste.