Libertango

DEGHELT Frédérique

Luis Nilta Bergo accepte, à plus de quatre-vingts ans, qu’une journaliste réalise son portrait filmé. La démarche n’est pas aisée et le vieil homme éprouve quelques difficultés à se livrer. Mais une fois la confiance établie, il raconte. Il est né en 1935, hémiplégique, méprisé par son père, totalement replié sur lui-même, et n’a trouvé de consolation qu’en écoutant de la musique sur une petite radio. À la sortie de l’adolescence, sa rencontre avec Astor Piazolla se révèle providentielle et décisive. Il consacre alors toute son énergie aux études musicales et finit par diriger les plus grands orchestres.   Frédérique Deghelt met en scène un personnage handicapé qui déploie des trésors de volonté et de courage pour se frayer un chemin dans le monde exigeant de la musique. Coutumière des livres bien documentés (Les brumes de l’apparence, NB juin 2014), elle tisse une histoire où l’on croise avec plaisir le pianiste Lalo Shifrin, le maestro Sergiu Celibidache ou Rostropovitch au violoncelle. Finesse d’analyse et délicatesse traversent ce roman à l’écriture souple, légère et travaillée. L’ouvrage, certes dense, mêlant introspection, souvenirs, extraits de journaux intimes ou dialogues, séduit par sa générosité, son ouverture à l’autre et à la différence. (P.H. et M.F.)