L’homme que l’on prenait pour un autre

EGLOFF Joël

Qui est-il, cet homme banal dont la petite vie rangĂ©e bascule dans l’irrationnel Ă  l’image de celle de la vieille tante qu’il visite ? Est-il ou non l’ex-compagnon de cellule de cet inconnu sorti de prison, venu squatter son appartement ? Ou, parce qu’il s’est trompĂ© d’étage, est-il, ou joue-t-il, au mari de la voisine de dessous ? Autant de situations grotesques vĂ©cues par cet homme qui endosse, sans rĂ©sister, des personnalitĂ©s fort diverses illustrant le cĂ©lĂšbre  » Je est un autre ».  Ces brĂšves histoires apparemment indĂ©pendantes sont habilement reliĂ©es par des dĂ©tails rĂ©currents. Elles finissent par s’enchaĂźner, s’emboĂźter ; naĂźt alors un univers surrĂ©aliste, peuplĂ© de gens insignifiants dont le quotidien angoissant est proche de celui des EnsoleillĂ©s (NB aoĂ»t-septembre 2000). En phrases courtes, prĂ©cises, l’auteur dessine avec humour et talent le portrait d’un ĂȘtre victime de rencontres improbables, qui observe sa malchance dans le miroir dĂ©formant qu’on lui renvoie, et brouillant ses repĂšres jusqu’Ă  l’absurde. Crise d’identitĂ© ? DĂ©sir d’altĂ©ritĂ©? Au lecteur imaginatif d’apporter une rĂ©ponse – difficile – au pathĂ©tique « Qui suis-je ? » de cet attachant antihĂ©ros.