Douce menace

ALLEGRIA Léa Simone

Dans un hĂŽtel de Rome, Nino vit les affres de l’attente d’Alba, avec laquelle il a rendez-vous, sans savoir si elle viendra. Suspendu Ă  son arrivĂ©e, il se dĂ©sespĂšre d’une absence qui se prolonge, tout en commençant Ă  s’y rĂ©signer ! RetardĂ©e par la pluie, Alba finit par arriver, pourvue d’un tableau ancien qu’elle a chinĂ© en s’abritant dans une galerie proche de la gare. C’est le dĂ©but d’un rĂ©cit trĂ©pidant qui mĂȘle l’histoire d’une passion amoureuse adultĂšre et celle de l’art.

Dans ce troisiĂšme roman jubilatoire, Ă  l’écriture « allĂšgre Â» et incisive, LĂ©a Simone Allegria plonge dans une enquĂȘte quasi policiĂšre au sein du monde de l’art, surfant sur « l’hypothĂšse du tableau volĂ© Â». Jouant des thĂšmes Ă©minemment baroques du double et du faux, le roman, ironique et enjouĂ©, file, Ă  400 ans de distance, la mĂ©taphore entre la destinĂ©e d’un tableau, double et copiĂ©, et de son possible auteur, et les vicissitudes d’un adultĂšre, faux couple qui vacille, faisant de la reprĂ©sentation (l’autoportrait d’un malade ironique) la mĂ©tonymie mĂȘme du rĂ©cit (l’autodĂ©rision d’une dĂ©ception amoureuse). PrĂ©texte Ă  l’évocation de la vie tumultueuse du Caravage, cette superposition qui pourrait basculer dans l’artifice fonctionne au contraire trĂšs naturellement. Pour les amoureux de Rome, qu’il illustre comme un guide original, et pour ceux du Caravage, ce roman Ă  clĂ©, sensible et cultivĂ©, qui s’achĂšve en clin d’Ɠil, est un rĂ©gal. Tant pis pour les autres ! (D.M.-D. et A.C.)