Dans l’ombre de la lumière

PUJADE-RENAUD Claude

En 372, à Carthage, centre intellectuel de l’Afrique romaine, Augustinus, étudiant en rhétorique, rencontre la belle Elissa. Fervents adeptes du manichéisme, ils sont sensibles à l’opposition radicale entre le bien et le mal, la lumière et l’ombre. Mais comment cette liaison avec une fille du peuple et ces croyances hérétiques n’irriteraient-elles pas l’omniprésente mère d’Augustinus, la très catholique Monnica, issue d’un milieu bourgeois ? Ils vont malgré tout vivre un amour passionné pendant quinze ans et avoir un fils. Quelques années après sa rencontre avec Elissa, il devient un éminent professeur de rhétorique. Appelé en Italie, il découvre la philosophie néoplatonicienne et, sous l’influence de sa mère et de l’évêque de Milan, se convertit au christianisme. Elissa, quittée du jour au lendemain, se voit privée de son fils, également sous la coupe de Monnica. Son bien-aimé, nommé évêque d’Hippone en 395, est un prédicateur très écouté. Lors de ses passages à Carthage, Elissa qui l’écoute constate avec douleur qu’il l’a chassée de sa mémoire.  Narratrice du roman, Elissa raconte dans un jeu de va-et-vient et de rêveries, sa vie d’autrefois avec Augustinus, son amant très ardent, et sa vie actuelle. Dans un récit précis, coloré, sensuel, Claude Pujade-Renaud sait varier le ton à l’infini. Elle passe du plus tranchant au plus rond, du plus réaliste au plus lyrique dans sa glorification de la beauté de la nature et de l’amour charnel. Elle s’attache à exprimer, avec justesse et empathie, la souffrance d’Elissa, trahie mais toujours fidèle, et rend en même temps justice à la grandeur de l’auteur des Confessions. Avec beaucoup de vivacité, malgré de nombreuses références aux textes augustiniens et aux événements de l’époque – querelles religieuses, invasions barbares, chute de Rome –, le roman retrace et met en lumière le parcours d’un homme habité par une mission. Ainsi le « docteur de la grâce» s’éclaire-t-il d’un jour différent, faisant surgir de l’ombre une belle et attachante figure féminine. C’est inattendu et très émouvant car cette femme a réellement existé.