À moitié

FRIOT Bernard, HERBAUTS Anne

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Soir après soir, quand il se déshabille, Monsieur Léon voit disparaître des éléments de sa garde robe : une chaussure, une manche de chemise, une moitié de ses lunettes… Le lendemain, quand il se réveille, la partie de son corps correspondante a disparu aussi : il lui manque un pied, un bras, un oeil. Il n’est bientôt plus qu’une moitié d’homme. Seul le miroir lui permet de se retrouver entier. Mais le plus étrange, c’est qu’il rencontre dans la rue son pied sur la jambe mutilée d’un soldat, son bras sur une ouvrière d’usine accidentée, un enfant avec la moitié de son visage…

Claude Ponti, dans Bizarre…bizarre, avait déjà imaginé un « Monsieur Monsieur » qui abandonne une partie de lui-même parce qu’il est amoureux. Dans cette histoire, il est question de donner un peu de soi par solidarité avec les mutilés de la vie. L’expérience ne rend ni heureux, ni triste, juste un peu différent, une impression en demi-teinte, comme les illustrations où la présence du blanc rend perceptible le vide d’une existence égoïste, et où l’agencement des formes souligne la déstructuration d’un univers. La présence d’un chat, d’un chien, d’un pigeon donne une note de sensualité et de réalisme au personnage très symbolique de ce conte philosophique.