Avec Faut pas prendre les cons pour des gens, Emmanuel ReuzĂ© et Nicolas Rouhaud livrent une satire sociale aussi absurde que percutante, construite en une succession de courtes saynĂštes oĂč la logique du monde contemporain est poussĂ©e jusquâĂ lâabsurde.
Dans cet univers miroir du nĂŽtre, Les MisĂ©rables de Victor Hugo est largement simplifiĂ© Ă la suite de plaintes multiples, on remplace les profs par des distributeurs automatiques, la police fait du tĂ©lĂ©travail… Chaque planche fonctionne comme une parabole grotesque, pointant du doigt les travers de nos sociĂ©tĂ©s modernes : absurditĂ©s administratives, cynisme politique, absurditĂ© consumĂ©riste et perte du bon sens collectif.
Narrativement, le format trĂšs court â une page, une idĂ©e â impose un rythme vif et efficace Ă l’image des Ćuvres de Fabcaro. Le ton pince-sans-rire, l’humour noir et le dĂ©tournement de codes du quotidien rappellent lâesprit dâun Reiser ou dâun Desproges version XXIe siĂšcle.
Graphiquement, ReuzĂ© joue la carte dâun dessin figuratif assez neutre, presque schĂ©matique dans ses traits, qui pourrait rappeler les dessins de roughmans. Ce dĂ©calage entre la forme presque fonctionnelle et la gravitĂ© des sujets abordĂ©s renforce le cynisme de l’Ćuvre.
(BB)
