Le soleil est une femme

À Saint-Denis, dans son HLM gris, Assiah, coincée au fond de son fauteuil roulant, attend désespérément le retour de son fils et déroule les souvenirs de sa vie. Arrivée très jeune de son Maroc natal, enceinte à l’adolescence, elle a fui dans la honte sa famille et élevé seule son enfant. Elle travaille dur comme femme de ménage à Nanterre. Avec en mémoire une idylle fugitive au goût amer d’interdit, elle n’a que son gamin dans le coeur et guette les miettes de son affection. Et lui, Mehdi, bien sûr « ç’a le saoule », tout comme l’étrange amour qu’elle a des plantes, nostalgie du Maroc. Il manque l’école, traîne dans la cité. La délinquance s’installe, transformant la vie d’Assiah en angoisse permanente à laquelle s’ajoute la culpabilité de n’avoir pu donner un père à Mehdi. Les psychologues, les éducateurs, le juge s’ingénient d’ailleurs à le lui rappeler… 

Rédigée à la première personne, cette habile plongée dans la psychologie d’une femme humble et peu sûre d’elle, maniant mal le français, sonne vrai. Les phrases simples, sensibles et expressives, traduisent la détresse et l’impuissance de cette mère Courage qui, soucieuse de bien faire, est perpétuellement dépassée par le comportement de son fils. Mais il va s’amender, il va trouver du travail, il sera un bon fils et fera de nouveau sa fierté… Rêves illusoires qui la font vivre et mourir à petit feu. Cette chronique douloureuse et tendre de la monoparentalité, de l’incommunicabilité, de la solitude, de l’amour blessé est tout à la fois actuelle et intemporelle. Elle touche au coeur ! 

Aucun jugement n’est porté, seul prévaut un immense sentiment de gâchis… 

Félix de Belloy, jeune romancier de trente-quatre ans, est aussi avocat au barreau de Paris et réside à Saint-Denis, ainsi peut-on imaginer qu’il a mis beaucoup de lui-même dans ces pages. D’autant qu’il a créé une association qui promeut la scolarité et l’emploi dans les cités. Un roman dense et poignant.