Au fond de la mer, dans les montagnes de Subagualavida, vit un poisson qui se prend pour un ours. Il dévore une autruche qu’il prend pour une truite, un lapin qu’il prend pour une sardine, un tamanoir qu’il prend pour un gardon… Mais pour qui se prend-il ?
De quoi se perdre délicieusement dans ces questions d’identité : le poisson-ours est-il ours ou poisson ? Qu’est-ce qui compte : son apparence ou la perception qu’il a de lui-même ? À moins qu’il joue à être un ours, sans y croire tout à fait, pour le plaisir ? Le dénouement laisse habilement la question sans réponse. Dans cet étonnant chamboule tout, le décalage entre le texte et l’image joue un rôle essentiel et renouvelle la fonction de l’illustration : ainsi, de l’autruche dessinée au fond de l’eau, le texte, jouant les Magritte, dit que c’est une truite. Qui dit vrai ? Tous nos repères sont bousculés. L’absurde, le non-sens sont au rendez-vous de cet album pétillant d’intelligence. Difficile ? Non ! Rien de compliqué dans la ritournelle rythmée du récit ni dans l’élégance du graphisme, suggestif et poétique.