La complainte du paresseux

Dans la petite ville des États-Unis où il habite, Andy se plaint : sa revue littéraire n’a pas de public et ses rares auteurs le submergent de poèmes exécrables, ses immeubles de rapport sont insalubres et ses locataires l’agressent. Alors il écrit à… sa soeur, son ex-femme, son banquier, un ancien camarade de classe et à l’administration, il rédige des petites annonces, des notices, des listes de courses, des lettres d’insultes – et occasionnellement un roman sur le paresseux, cet animal « à la morosité muette », dont il se sent proche. La plume est son seul rempart contre l’amertume, son refuge, son défouloir, elle justifie tous ses choix, lui procure l’impunité face aux responsabilités qu’il refuse, et finalement devient complice de son inexorable déchéance.

L’auteur de Firmin : autobiographie d’un grignoteur de livres (NB juillet-août 2009) signe un long et habile enlisement dans une grisaille sans aspérité ni fond pour se ressaisir. Chronique de la vie d’un looser, ces écrits en majorité épistolaires sont autant de monologues désespérés, subtilement teintés d’autodérision. Ils dévoilent peu à peu une personnalité complexe, sincère, dépressive, et cependant narcissique et manipulatrice. Avec une ambiguïté maîtrisée à merveille.