Ce que tu vois dans le noir

Située à deux heures de Los Angeles, Bakersfield est encore une bourgade en 1959. Teresa, vingt-trois ans, y vit seule depuis le départ de sa mère. Chaque jour, elle admire acteurs et chanteurs sur l’écran de télévision d’un magasin, s’imprégnant des chansons dont elle meuble sa morne vie. Un ouvrier agricole mexicain la courtise, mais c’est pour le beau Dan Watson que son coeur bat. Dan, dont la mère est la gérante d’un motel où s’arrête « l’Actrice », qui ressasse dans sa tête les scènes osées que « le Réalisateur » lui impose pour un prochain film. Latino-américain d’origine paysanne, aujourd’hui professeur d’université, Manuel Muñoz est né en Californie en 1972. Alternant les chapitres, il suit en parallèle les itinéraires de trois femmes, la chute révélant – partiellement – le lien entre des existences dissemblables. Les séquences s’enchaînent à la manière d’un scénario (Hitchcock tourna « Psychose » à Bakersfield vers 1960). Un témoin anonyme, partie prenante du drame, éclaire personnalités et intrigue. Malgré une construction déroutante et quelques longueurs, la qualité d’écriture de ce premier roman est certaine. L’atmosphère d’une petite vallée où l’on fantasme sur les studios et les stars d’Hollywood est restituée en phrases courtes, souvent poétiques.